Jolis Jolis Monstres – Julien Dufresne-Lamy / Paris is burning !

Coucou les paupiettes !

On se retrouve aujourd’hui pour parler de Jolis Jolis Monstres, roman écrit par Julien Dufresne-Lamy et publié aux éditions Belfond le 22 août 2019, dans la collection Pointillés. En parallèle de cette lecture, j’ai regardé le documentaire Paris is burning sur Netflix, réalisé dans les années 80 par Jennie Livingston (première sortie officielle en 1991). Avant de vous donner mon avis, je tiens à remercier la maison d’éditions pour l’envoi de ce livre !

Certains disent qu’on est des monstres, des fous à électrocuter.
Nous sommes des centaures, des licornes, des chimères à tête de femme.
Les plus jolis monstres du monde.

Au début des années sida, James est l’une des plus belles drag-queens de New York. La légende des bals, la reine des cabarets, l’amie fidèle des club kids et des stars underground. Quand trente ans plus tard il devient le mentor de Victor, un jeune père de famille à l’humour corrosif, James comprend que le monde et les mentalités ont changé.

Sur trois décennies, Jolis jolis monstres aborde avec finesse et fantaisie la culture drag, le voguing et la scène ballroom dans un grand théâtre du genre et de l’identité. Au cœur d’une Amérique toujours plus fermée et idéologique, ce roman tendre mais bruyant est une ode à la beauté, à la fête et à la différence. Une prise de parole essentielle.

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Dans ce roman, nous découvrons l’histoire de la drag-culture dans ses grandes lignes depuis un peu plus de trente ans. Par le biais de deux narrateurs, nous suivons leur évolution pendant les années 80, les années sida, jusqu’à aujourd’hui, où les drag-queens sont beaucoup plus largement acceptées dans notre société, au même titre que des comédiennes ou des chanteuses. Elles font partie de la pop culture.

Tout (ou presque) oppose les deux narrateurs, qui se rencontrent un beau soir dans un bar. James, afro-américain, une soixantaine d’années, revient à New York après avoir abandonné la scène drag dans les années 90. Il raconte ses débuts en tant que Lady Prudence, son arrivée dans la Grosse Pomme, les premiers cabarets, les grandes soirées, la drogue, la violence, la prostitution, le sida. Cette maladie qui a fait des ravages dans leur communauté, tant au niveau personnel que professionnel. Les drag-queens deviennent des pestiférées, des créatures contagieuses. Victor, une petite vingtaine d’années, est père et hétérosexuel. Il a fait de la prison suite à quelques erreurs de jeunesse, mais il a aujourd’hui trouvé ce qu’il voulait faire de sa vie. Il nous raconte, lui aussi, son parcours. Sa découverte de la culture drag lors d’un spectacle vu par hasard, celui de Bianca Del Rio. Sa passion pour l’humour. Son envie de faire partie de cette communauté, mais ce n’est pas facile lorsqu’on est mari et père. Il finit par tout plaquer pour se lancer à New York…

Cette rencontre avec James va marquer un tournant décisif dans sa vie, puisque Lady Prudence va devenir sa mère drag, lui apprendre à se donner une identité, à préparer un show. Et surtout, elle va l’inscrire à l’émission que (presque) tout le monde connait : RuPaul’s Drag Race. La télé-réalité a sûrement contribué à visibiliser la culture drag, s’imprégnant fortement des traditions des balls, avec les catégories des défilés, ainsi qu’ au travers de multiples challenges tout au long de la saison, nous prouvant qu’il y a tout types de drag-queens, des reines de bal comme des comédiennes, d’autres plus inspirées des club kids.

Ces deux narrateurs sont fictifs, inventés de toutes pièces par Julien Dufresne-Lamy, mais tous les autres personnages que vous croiserez dans ce roman existent (ou ont existé) dans la « vraie vie ». L’histoire que l’auteur nous raconte est pour moi à la fois un témoignage, un documentaire et un hommage. Il nous présente la culture drag, ceux qui l’ont influencé, l’ont fait vivre. Toutes les personnalités, les artistes qui les ont côtoyé (Madonna, David Bowie, Keith Haring, etc). Il nous raconte le tournage de Paris is burning, le succès retentissant de ce film documentaire pour lequel les mères des maisons interviewées n’ont presque rien touché.

Je connaissais déjà l’univers grâce à l’émission de RuPaul, que je regarde depuis un moment. Mais j’ai ressenti le besoin de voir Paris is burning pour découvrir la ball-culture des années 80. De mettre des visages sur tous les noms cités dans ce roman. Il y a quelques photographies à la fin de l’ouvrage, mais je vous encourage vivement à voir le film, très intéressant. Nous y trouvons des témoignages directs des célèbres drag-queens de l’époque, nous découvrons ce qu’est le voguing dans toute sa splendeur.

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J’ai passé un très bon moment de lecture avec le roman de Julien Dufresne-Lamy. Jolis Jolis Monstres est bien écrit, prenant. Le contenu est riche et passionnant. J’avoue avoir été plus intéressée par la première partie, consacrée à James et Lady Prudence. La partie consacrée à l’émission de RuPaul était plaisante à lire, mais connaissant déjà l’émission et ayant une petite idée de l’envers du décor (ouais, c’est pas jojo), ce n’était pas (autant) une grande découverte. J’ai aussi été perturbée par le fait que l’auteur mélange des drags de différentes saisons dans une même émission.

De nombreuses choses ressortent de cette lecture. L’amour, la tendresse, le soutien que se portent les membres de cette communauté. La violence du monde dans lequel ils évoluent. Le courage de ces hommes, de ces femmes, de ces créatures face à une société qui a tendance à rejeter ce qu’ils ne comprennent pas, ce qu’ils n’ont pas envie de comprendre. Les temps ont été durs, ils le sont toujours d’ailleurs, même si le métier de drag est beaucoup plus intégré, respecté aujourd’hui. Julien Dufresne-Lamy en dresse un portrait réaliste, touchant, qui prend souvent aux tripes. Les personnages (fictifs ou non) sont attachants et on prend plaisir à découvrir toute cette culture à leurs côtés. Après avoir vu leurs visages dans Paris is burning (ou dans RuPaul’s Drag Race), on a vraiment l’impression d’être à leurs côtés dans cette grande aventure.

En résumé, je vous recommande chaudement ce magnifique roman. Julien Dufresne-Lamy nous immerge complètement dans la culture drag, les bons comme les mauvais côtés. Ce roman est une ode à la tolérance, à l’ouverture d’esprit, mais aussi à l’acceptation de soi. Les personnages sont attachants, touchants, fascinants. L’histoire est formidablement bien écrite, très enrichissante et elle prend aux tripes. Vous voilà prévenus. On fait quoi ? On fonce !
Je vous recommande également de voir le documentaire Paris is burning (et jetez donc un œil à l’émission de RuPaul), très intéressant également et un beau témoignage sur la ball-culture des années 80.

Alors, tentés ? Vous l’avez lu, qu’en avez-vous pensé ?

18/20

La bisette !

Publié par

Ibidouu

Petite chose à la recherche d'un avenir.

2 réflexions au sujet de “Jolis Jolis Monstres – Julien Dufresne-Lamy / Paris is burning !”

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