Coucou les paupiettes !
Je vous propose aujourd’hui de découvrir l’un des romans de la rentrée littéraire 2019 qui a un peu traîné dans ma PAL (honte sur moi, ce n’est pas le seul). Techniquement, il ne s’agit pas d’un roman, mais d’un recueil de nouvelles. Les réfugiés a été écrit par Viet Thanh Nguyen, un auteur que je voulais découvrir depuis un moment (j’ai d’ailleurs Le sympathisant dans ma bibliothèque également), et publié aux éditions Belfond le 5 septembre 2019. Avant de vous donner mon avis, je tiens à remercier la maison d’édition pour l’envoi de ce livre.
Californie, années 1980-1990.
Une ghost writer qui reçoit la visite du fantôme de son frère mort vingt-cinq ans plus tôt, une mère de famille au caractère bien trempé, un petit escroc soucieux de justifier moralement ses méfaits, un jeune réfugié qui se trouve plongé dans la bohème de San Francisco, une femme qui éprouve pour la première fois de la jalousie après 40 ans de mariage, une afro-américano-japonaise qui se sent « l’âme vietnamienne » au grand désespoir de son vétéran de père, un trentenaire divorcé qui jongle avec deux boulots et qui peine à trouver sa place, une jeune femme d’origine vietnamienne totalement américanisée vue à travers les yeux d’une jeune Vietnamienne du Vietnam… Huit nouvelles pour huit « tranches de vie » au sein desquelles le lecteur se trouve plongé sans préavis.
Tous sont vietnamien ou liés par les hasards de la vie à cette communauté des réfugiés qui ont fui le communisme à la fin des années 1970. Certains ont directement vécu le drame des boat people, d’autres sont leurs descendants ou encore de simples relations. Il y a ceux qui vivent dans le passé et ceux qui ont tourné la page depuis longtemps…
Portrait d’une communauté aux multiples visages, un ensemble disparate d’hommes et de femmes aux prise avec la difficulté de refaire leur vie, le déracinement, la perte des repères mais aussi avec les revers de la vie de famille et les aléas de la vie. Avec ces histoires particulières, on touche à une certaine forme d’universalité.
Les réfugiés est un recueil de nouvelles sur la question de l’immigration, plus particulièrement du Vietnam. Au travers des portraits de huit personnages vivant pour la plupart aux États-Unis, nous en découvrons un peu plus sur ces hommes et ces femmes qui ont dû reconstruire leur vie après avoir fui leur pays, le communisme, la guerre.
Au premier abord, les tranches de vie racontées par Viet Thanh Nguyen peuvent sembler anodines et sans grand intérêt pour le lecteur. Elles sont cependant très intéressantes et nous dévoilent beaucoup de choses. Peu importe ce que l’on fait, où l’on vit, le passé fait partie intégrante de nous et nous accompagne partout. La notion de souvenir est très présente dans ces huit nouvelles et, par bribes, nous découvrons quelques épisodes de l’histoire du Vietnam. Mais les personnages qu’il nous présente ne vivent pas dans le passé. Au-delà de leurs souvenirs, l’auteur s’intéresse aussi à leur présent, leur intégration, le choc culturel… Au tout début, je crois que c’est dans la deuxième nouvelle, un Américain explique à sa femme qu’il ne fait pas la différence entre les Japonais, les Coréens ou les Chinois, qu’ils sont tous Asiatiques. Viet Thanh Nguyen met en avant une communauté trop souvent ignorée, nous parle de huit anonymes, huit êtres humains. En racontant leur histoire, il leur rend à chacun leur individualité.
Ces huit nouvelles ne parlent pas uniquement de l’immigration, d’autres sujets sont abordés et qui toucheront plus ou moins chaque lecteur : la maladie, l’homosexualité, la quête de soi, l’amour, l’amitié, la famille… L’ensemble de ces questions est traité avec justesse, délicatesse. L’auteur n’en fait pas des caisses, il ne cherche pas à nous tirer des larmes en nous racontant ce que sa communauté a vécu dans les années 1970/80 (il a lui même fui Saïgon avec sa famille, alors qu’il n’avait que quatre ans). L’objectif n’est pas de nous choquer, tout est développé avec subtilité, les choses sont dites sans vraiment être nommées. L’intérêt de ce livre n’est pas de nous parler de l’histoire du Vietnam, mais de ces hommes et femmes qui l’ont fui et qui peinent à trouver leur place suite à ce déracinement. Faut-il tout laisser derrière soi ?
La plume de Viet Thanh Nguyen est à la fois douce et percutante, certains passages résonnent encore en moi plusieurs jours après avoir terminé ce recueil. Toutes les histoires ne se valent pas, certaines sont beaucoup plus prenantes, plus intenses, plus touchantes. Cela dépendra de la sensibilité de chacun. L’histoire de Liem, jeune Vietnamien qui débarque dans une famille d’accueil à San Francisco, ne m’a pas transcendée. Le sujet est intéressant, mais l’effet sur moi n’a pas été le même que l’histoire du Professeur, qui perd doucement la mémoire et qui appelle sa femme par un autre prénom…
En résumé, Les réfugiés est un recueil de nouvelles intéressant, prenant et qui ne laissera pas le lecteur indemne. Avec justesse et sensibilité, l’auteur nous invite dans l’intimité de huit personnages, de huit familles et nous raconte l’exil, le choc culturel, mais aussi la vie, l’amour. Ces récits sont à la fois uniques et universels. À découvrir !
Alors, tentés ?
16/20
La bisette !
Une réflexion sur “Les réfugiés – Viet Thanh Nguyen.”